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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

passa rapidement au Capitole avec Corinne : noms impérissables, illustres cendres, qui se sont associés au nom et aux cendres de la ville éternelle[1].

Ainsi ont marché les changements de mœurs et de personnages, de siècle en siècle, en Italie ; mais la grande transformation a surtout été opérée par notre double occupation de Rome.

La République romaine, établie sous l’influence du Directoire, si ridicule qu’elle ait été avec ses deux consuls et ses licteurs (méchants facchini pris parmi la populace), n’a pas laissé que d’innover heureusement dans les lois civiles ; c’est des préfectures, imaginées par cette République romaine, que Bonaparte a emprunté l’institution de ses préfets.

Nous avons porté à Rome le germe d’une administration qui n’existait pas ; Rome, devenue le chef-lieu du département du Tibre, fut supérieurement réglée. Le système hypothécaire lui vient de nous. La suppression des couvents, la vente des biens ecclésiastiques sanctionnée par Pie VI, ont affaibli la foi dans la permanence de la consécration des choses religieuses. Ce fameux index, qui fait encore un peu de bruit de ce côté-ci des Alpes, n’en fait aucun à Rome : pour quelques bajocchi on obtient la permission de lire, en sûreté de conscience, l’ouvrage défendu. L’index est au nombre de ces usages qui restent comme des témoins des anciens temps au milieu des

  1. J’invite à lire dans la Revue des Deux-Mondes, 1er et 15 juillet 1835, deux articles de M. J.-J. Ampère, intitulés : Portraits de Rome à différents âges. Ces curieux documents complèteront un tableau dont on ne voit ici qu’une esquisse. (Note de Paris, 1837.) Ch.