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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

Arenenberg, le 4 mai 1832.
« Monsieur le vicomte,

« Je viens de lire votre dernière brochure. Que les Bourbons sont heureux d’avoir pour soutien un génie tel que le vôtre ! Vous relevez une cause avec les mêmes armes qui ont servi à l’abattre ; vous trouvez des paroles qui font vibrer tous les cœurs français. Tout ce qui est national trouve de l’écho dans votre âme ; ainsi, quand vous parlez du grand homme qui illustra la France pendant vingt ans, la hauteur du sujet vous inspire, votre génie l’embrasse tout entier, et votre âme alors, s’épanchant naturellement, entoure la plus grande gloire des plus grandes pensées.

« Moi aussi, monsieur le vicomte, je m’enthousiasme pour tout ce qui fait l’honneur de mon pays ; c’est pourquoi, me laissant aller à mon impulsion, j’ose vous témoigner la sympathie que j’éprouve pour celui qui montre tant de patriotisme et tant d’amour de la liberté. Mais, permettez-moi de vous le dire, vous êtes le seul défenseur redoutable de la vieille royauté ; vous la rendriez nationale, si l’on pouvait croire qu’elle pensât comme vous ; ainsi, pour la faire valoir, il ne suffit pas de vous déclarer de son parti, mais bien de prouver qu’elle est du vôtre.

« Cependant, monsieur le vicomte, si nous différons d’opinions, au moins sommes-nous d’accord dans les souhaits que nous formons pour le bonheur de la France.

« Agréez, je vous prie, etc., etc.

« Louis-Napoléon Bonaparte. »