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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

avait des serviteurs plus pauvres que moi et plus dignes de ses bontés. Mais les derniers écrits que j’ai publiés m’ont causé des dommages et suscité des persécutions ; j’ai essayé inutilement de vendre le peu de chose que je possède. Je me vois forcé d’accepter, non la pension annuelle que Votre Majesté se proposait de me faire sur sa royale indigence, mais un secours provisoire pour me dégager des embarras qui m’empêchent de regagner l’asile où je pourrai vivre de mon travail. Sire, il faut que je sois bien malheureux pour me rendre à charge, même un moment, à une couronne que j’ai soutenue de tous mes efforts et que je continuerai de servir le reste de ma vie.

« Je suis, avec le plus profond respect, etc.

« Chateaubriand. »

Mon neveu, le comte Louis de Chateaubriand, m’avança de son côté une même somme de vingt mille francs. Ainsi dégagé des obstacles matériels, je fis les préparatifs de mon second départ. Mais une raison d’honneur m’arrêtait : madame la duchesse de Berry était sur le sol français ; que deviendrait-elle, et ne devais-je pas rester aux lieux où ses périls pouvaient m’appeler ? Un billet de la princesse, qui m’arriva du fond de la Vendée, acheva de me rendre libre.

« J’allais vous écrire, monsieur le vicomte, touchant ce gouvernement provisoire que j’ai cru devoir former, lorsque j’ignorais quand et même si je pouvais rentrer en France, et dont on me mande que vous aviez consenti à faire partie. Il n’a pas existé de