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elle est demeurée quelque temps dans un château sans être reconnue de personne, excepté du curé du lieu ; le maréchal de Bourmont doit la rejoindre en Vendée par une autre route.

Instruits de tout cela à Paris, il nous était facile de prévoir le résultat. L’entreprise a pour la cause royaliste un autre inconvénient ; elle va découvrir la faiblesse de cette cause et dissiper les illusions. Si Madame ne fût point descendue dans la Vendée, la France aurait toujours cru qu’il y avait dans l’Ouest un camp royaliste au repos, comme je l’appelais.

Mais enfin, il restait encore un moyen de sauver Madame et de jeter un nouveau voile sur la vérité : il fallait que la princesse partît immédiatement ; arrivée à ses risques et périls comme un brave général qui vient passer son armée en revue, tempérer son impatience et son ardeur, elle aurait déclaré être accourue pour dire à ses soldats que le moment d’agir n’était point encore favorable, qu’elle reviendrait se mettre à leur tête quand l’occasion l’appellerait. Madame aurait du moins montré une fois un Bourbon aux Vendéens : les ombres des Cathelineau, des d’Elbée, des Bonchamps, des La Rochejaquelein, des Charette se fussent réjouies.

Notre comité s’est rassemblé : tandis que nous discourions, arrive de Nantes un capitaine, qui nous apprend le lieu habité par l’héroïne. Le capitaine est un beau jeune homme, brave comme un marin, original comme un Breton, Il désapprouvait l’entreprise ; il la trouvait insensée ; mais il disait : « Madame ne


    Montaigu (Vendée). Le château de la Preuille appartenait au colonel de Nacquart.