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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

anciens démêlés historiques entre la maison des Cadet et la maison des Capet ? Henri IV, aïeul de ce beau-père qui n’est pas plus roi que cette dame n’est Altesse Royale, traversait un jour la forêt de Saint-Germain ; huit seigneurs s’y étaient embusqués pour tuer le Béarnais ; ils furent pris, « Un de ces galans, dit l’Estoile, estoit un apothicaire qui demanda de parler au roy, auquel Sa Majesté s’étant enquis de quel état il estoit, il lui répondit qu’il estoit apothicaire. — Comment ! dit le roy, a-t-on accoutumé de faire ici un état d’apothicaire ? Guettez-vous les passans pour… ? » Henri IV était un soldat, la pudeur ne l’embarrassait guère, et il ne reculait pas plus devant un mot que devant l’ennemi.

Je soupçonne M. de Gassicourt, à cause de son humeur contre le petit-fils de Henri IV, d’être le petit-fils du pharmacien ligueur. Le maire du quatrième arrondissement m’avait sans doute écrit dans l’espoir que j’engagerais le fer avec lui ; mais je ne veux rien engager avec M. Cadet : qu’il me pardonne ici de lui laisser une petite marque de mon souvenir.

Depuis ces jours où j’avais vu passer les grandes révolutions et les grands révolutionnaires, tout s’était bien racorni. Les hommes qui ont fait tomber un chêne, replanté trop vieux pour qu’il reprît racine, se sont adressés à moi ; ils m’ont demandé quelques deniers de la veuve afin d’acheter du pain ; la lettre du Comité des décorés de Juillet est un document utile à noter pour l’instruction de l’avenir.