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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

les rapports poétiques et moraux ; je la finis par un ouvrage où je considère la même religion sous ses rapports philosophiques et historiques : j’ai commencé ma carrière politique sous la Restauration, je la finis avec la Restauration. Ce n’est pas sans une secrète satisfaction que je me trouve ainsi conséquent avec moi-même. »

Paris, mai 1831.

La résolution que je conçus, au moment de la catastrophe de Juillet, n’a point été abandonnée par moi. Je me suis occupé des moyens de vivre en terre étrangère, moyens difficiles, puisque je n’ai rien : l’acquéreur de mes œuvres m’a fait à peu près banqueroute, et mes dettes m’empêchent de trouver quelqu’un qui veuille me prêter.

Quoi qu’il en soit, je vais me rendre à Genève[1] avec la somme qui m’est survenue de la vente de ma dernière brochure (De la Restauration et de la Monarchie élective). Je laisse ma procuration pour vendre la maison où j’écris cette page pour ordre de date. Si je trouve marchand à mon lit, je pourrai trouver un autre lit hors de France. Dans ces incertitudes et ces mouvements, jusqu’à ce que je sois établi quelque part, il me sera impossible de reprendre la suite de mes Mémoires à l’endroit où je les ai interrompus[2]. Je continuerai donc d’écrire les choses du moment ac-

  1. Le départ de Chateaubriand pour la Suisse eut lieu le 16 mai 1831 ; il arriva à Genève le 23 mai.
  2. Ceci se rapporte à ma carrière littéraire et à ma carrière politique laissées en arrière, lacunes qui sont maintenant comblées par ce que je viens d’écrire dans ces dernières années, 1838 et 1839. (Paris, note de 1839.) Ch.