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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

parti, et ce parti valait bien la peine qu’on en eût dit quelques mots.

« D’affreux ministres ont souillé la couronne, et ils ont soutenu la violation de la loi par le meurtre ; ils se sont joués des serments faits au ciel, des lois jurées à la terre.

« Étrangers, qui deux fois êtes entrés à Paris sans résistance, sachez la vraie cause de vos succès : vous vous présentiez au nom du pouvoir légal. Si vous accouriez aujourd’hui au secours de la tyrannie, pensez-vous que les portes de la capitale du monde civilisé s’ouvriraient aussi facilement devant vous ? La nation française a grandi, depuis votre départ, sous le régime des lois constitutionnelles, nos enfants de quatorze ans sont des géants ; nos conscrits à Alger, nos écoliers à Paris, viennent de vous révéler les fils des vainqueurs d’Austerlitz, de Marengo et d’Iéna ; mais les fils fortifiés de tout ce que la liberté ajoute à la gloire.

« Jamais défense ne fut plus légitime et plus héroïque que celle du peuple de Paris. Il ne s’est point soulevé contre la loi ; tant qu’on a respecté le pacte social, le peuple est demeuré paisible ; il a supporté sans se plaindre les insultes, les provocations, les menaces ; il devait son argent et son sang en échange de la charte, il a prodigué l’un et l’autre.

« Mais lorsqu’après avoir menti jusqu’à la dernière heure, on a tout à coup sonné la servitude ; quand la conspiration de la bêtise et de l’hypocrisie a soudainement éclaté ; quand une terreur de château organisée par des eunuques a cru pouvoir remplacer