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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

me flatter d’un succès, je pensai que je pouvais faire entendre des vérités utiles. Je me rendis au Palais-Royal avec le chevalier d’honneur de la reine future. Introduit par l’entrée qui donne sur la rue de Valois, je trouvai madame la duchesse d’Orléans et madame Adélaïde dans leurs petits appartements. J’avais eu l’honneur de leur être présenté autrefois. Madame la duchesse d’Orléans me fit asseoir auprès d’elle, et sur-le-champ elle me dit : « Ah ! monsieur de Chateaubriand, nous sommes bien malheureux ! Si tous les partis voulaient se réunir, peut-être pourrait-on encore se sauver ! Que pensez-vous de tout cela ?

« — Madame, répondis-je, rien n’est si aisé : Charles X et monsieur le dauphin ont abdiqué : Henri est maintenant le roi ; monseigneur le duc d’Orléans est lieutenant général du royaume : qu’il soit régent pendant la minorité de Henri V, et tout est fini.

« — Mais, monsieur de Chateaubriand, le peuple est très agité ; nous tomberons dans l’anarchie.

« — Madame, oserai-je vous demander quelle est l’intention de monseigneur le duc d’Orléans ? Acceptera-t-il la couronne, si on la lui offre ? »

Les deux princesses hésitèrent à répondre. Madame la duchesse d’Orléans répartit après un moment de silence :

    lier d’honneur de la duchesse d’Orléans, dont Villemain ne donne pas ici le nom, jugeant sans doute ces menus détails indignes de la majesté de l’histoire, était M. Anatole de Montesquiou, deux fois nommé par Chateaubriand, qui n’avait pas les mêmes scrupules. L’auteur des Mémoires avait déjà eu occasion de parler de M. de Montesquiou. Voir plus haut pages 338 et 339 et la note 1 de la page 338 (Livre XV de la Troisième Partie et note 7 du Livre XV de la Troisième Partie).