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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

Saint-Cloud ; il avait les ordonnances dans sa poche depuis douze ou quinze heures, depuis hier, selon son expression ; il n’avait pu rencontrer ni le général Gérard, ni M. Casimir Périer : M. de Mortemart était bien malheureux ! M. Bérard fit l’observation suivante sur la lettre communiquée :

« Je ne puis, dit-il, m’empêcher de signaler ici un manque de franchise : M. de Mortemart, qui se rendait ce matin chez M. Laffitte lorsque je l’ai rencontré, m’a formellement dit qu’il viendrait ici. »

Les cinq ordonnances furent lues. La première rappelait les ordonnances du 25 juillet, la seconde convoquait les Chambres pour le 3 août, la troisième nommait M. de Mortemart ministre des affaires étrangères et président du conseil, la quatrième appelait le général Gérard au ministère de la guerre, la cinquième M. Casimir Périer au ministère des finances. Lorsque je trouvai enfin M. de Mortemart chez le grand référendaire, il m’assura qu’il avait été obligé de rester chez M. de Sémonville, parce qu’étant revenu à pied de Saint-Cloud, il s’était vu forcé de faire un détour et de pénétrer dans le bois de Boulogne par une brèche : sa botte ou son soulier lui avait écorché le talon. Il est à regretter qu’avant de produire les actes du trône, M. de Mortemart n’ait pas essayé de voir les hommes influents et de les incliner à la cause royale. Ces actes tombant tout à coup au milieu de députés non prévenus, personne n’osa se déclarer. On s’attira cette terrible réponse de Benjamin Constant : « Nous savons d’avance ce que la Chambre des pairs nous dira : elle acceptera purement et simplement la révocation des ordonnances. Quant à moi, je ne