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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

nances : au lieu de les communiquer d’abord aux députés, sa lassitude l’obligea de rétrograder jusqu’au Luxembourg. À midi, il envoya les ordonnances à M. Sauvo[1] ; celui-ci répondit qu’il ne les pouvait publier dans le Moniteur sans l’autorisation de la Chambre des députés ou de la commission municipale.

M. Bérard s’étant expliqué, comme je viens de le dire, à la Chambre, une discussion s’éleva pour savoir si l’on recevrait ou si l’on ne recevrait pas M. de Mortemart. Le général Sébastiani insista pour l’affirmative ; M. Mauguin déclara que si M. de Mortemart était présent, il demanderait qu’il fût entendu, mais que les événements pressaient et que l’on ne pouvait pas dépendre du bon plaisir de M. de Mortemart.

On nomma cinq commissaires chargés d’aller conférer avec les pairs : ces cinq commissaires furent MM. Augustin Périer[2], Sébastiani, Guizot, Benjamin

  1. François Sauvo (1772-1859). Il était attaché, depuis 1795, à la rédaction du Moniteur universel, lorsqu’il fut chargé, en 1800, de la direction de ce journal, par Maret, secrétaire général des Consuls ; il devait la conserver jusqu’en 1840. — Dans la soirée du 25 juillet 1830, il avait été averti qu’il recevrait des articles fort étendus qui ne seraient terminés qu’au milieu de la nuit et devraient être insérés dans le numéro du lendemain. Vers onze heures du soir, il fut mandé par M. de Chantelauze, qui lui remit le rapport et les ordonnances. M. Sauvo parcourut les pièces « Qu’en pensez-vous ? » lui demanda M. de Montbel qui était présent. — « Dieu sauve le Roi et la France ! » répondit le rédacteur du Moniteur. Et il ajouta en se retirant : « Messieurs, j’ai cinquante-sept ans, j’ai vu toutes les journées de la Révolution et je me retire avec une profonde terreur. »
  2. Augustin-Charles Périer (1773-1833), frère de Casimir Périer. Il était député de l’Isère depuis 1827 et siégeait au centre gauche. Non réélu aux élections du 5 juillet 1831, il fut nommé pair de France le 16 mai 1832.