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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

général Sébastiani lui parler du prince. Le général répondit d’une manière évasive ; le duc d’Orléans, assura-t-il, ne l’avait jamais entretenu de pareils desseins et ne l’avait autorisé à rien.

Vers midi, toujours dans la journée du 28, la réunion générale des députés eut lieu chez M. Audry de Puyravault[1]. M. de La Fayette, chef du parti républicain, avait rejoint Paris le 27 ; M. Laffitte, chef du parti orléaniste, n’arriva que dans la nuit du 27 au 28 ; il se rendit au Palais-Royal, où il ne trouva personne ; il envoya à Neuilly : le roi en herbe n’y était pas.

Chez M. de Puyravault, on discuta le projet d’une protestation contre les ordonnances. Cette protestation, plus que modérée, laissait entières les grandes questions.

M. Casimir Périer fut d’avis de dépêcher vers le duc de Raguse ; tandis que les cinq députés choisis se préparaient à partir, M. Arago[2] était chez le maréchal : il s’était décidé, sur un billet de madame de Boigne, à devancer les commissaires. Il représenta au maré-

    à mettre au net le projet de protestation dont il avait été chargé la veille (dans la réunion tenue chez M. Casimir Périer) ; à côté, dans le salon, se trouvaient plusieurs de nos amis, entre autres M. de Rémusat et M. Cousin, disputant assez vivement ; nous vîmes entrer au bout d’un quart d’heure un rédacteur du National qui depuis s’est fait un nom, M. Carrel. — « Tout est fini pour cette fois, nous dit-il tristement ; le gouvernement est maître du terrain ; mais, patience, il n’est pas au bout ! »

  1. Rue du faubourg Poissonnière, no 40.
  2. Dominique-François-Jean Arago (1786-1853), le célèbre astronome. Député de 1831 à 1848, membre du Gouvernement provisoire de 1848, représentant du peuple aux Assemblées constituante et législative de 1848-49. — Lorsqu’éclata la Révolution de Juillet, il était directeur de l’Observatoire.