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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

JOURNÉE CIVILE DU 28 JUILLET.

Durant qu’on livrait ces combats, la révolution civile et politique suivait parallèlement la révolution militaire. Les soldats détenus à l’Abbaye furent mis en liberté ; les prisonniers pour dettes, à Sainte-Pélagie, s’échappèrent, et les condamnés pour fautes politiques furent élargis : une révolution est un jubilé ; elle absout de tous les crimes, en en permettant de plus grands.

Les ministres tinrent conseil à l’état-major : ils résolurent de faire arrêter, comme chefs du mouvement, MM. Laffitte, La Fayette, Gérard, Marchais, Salverte et Audry de Puyravault ; le maréchal en donna l’ordre ; mais, quand plus tard ils furent députés vers lui, il ne crut pas de son honneur de mettre son ordre à exécution.

Une réunion du parti monarchique, composée de pairs et de députés, avait eu lieu chez M. Guizot : le duc de Broglie s’y trouva ; MM. Thiers et Mignet, qui avaient reparu, et M. Carrel, quoique ayant d’autres idées, s’y rendirent. Ce fut là que le parti de l’usurpation prononça le nom du duc d’Orléans pour la première fois[1]. M. Thiers et M. Mignet, allèrent chez le

  1. Au sujet de ce passage des Mémoires d’Outre-tombe, le duc Victor de Broglie dit, au tome III de ses Souvenirs, page 287 : « L’auteur de cette assertion a été mal informé ; la réunion fut fortuite ; MM. Thiers et Mignet ne s’y trouvèrent pas. Il n’y fut question de M. le duc d’Orléans ni directement ni indirectement. » — Voici du reste les détails que donne le duc de Broglie sur la réunion qui eut lieu chez M. Guizot dans la matinée du 28 : « En allant vers les dix heures chez M. Guizot, qui demeurait rue de la Ville-l’Évêque, je ne remarquai aucun symptôme d’agitation. Je trouvai M. Guizot dans son cabinet, occupé