moine dans l’admirable couvent de la Madona del Monte.
« Je traversai près de Savignano la ravine d’un petit torrent : quand on me dit que j’avais passé le Rubicon, il me sembla qu’un voile se levait et que j’apercevais la terre du temps de César. Mon Rubicon, à moi, c’est la vie : depuis longtemps j’en ai franchi le premier bord.
« À Rimini, je n’ai rencontré ni Françoise, ni l’autre ombre sa compagne, qui au vent semblaient si légères :
E paion si al vento esser leggieri[1].
« Rimini, Pesaro, Fano, Sinigaglia, m’ont amené à Ancône sur des ponts et sur des chemins laissés par les Augustes. Dans Ancône on célèbre aujourd’hui la fête du pape ; j’en entends la musique à l’arc triomphal de Trajan : double souveraineté de la ville éternelle. »
« Nous sommes venus coucher à Lorette. Le territoire offre un spécimen parfaitement conservé de la colonie romaine. Les paysans fermiers de Notre-Dame sont dans l’aisance et paraissent heureux ; les paysannes, belles et gaies, portent une fleur à leur chevelure. Le prélat-gouverneur nous a donné l’hospitalité. Du haut des clochers et du sommet de quelques éminences de la ville, on a des perspectives riantes sur les campagnes, sur Ancône et sur la mer. Le soir nous avons eu une tempête. Je me
- ↑ L’Enfer, chant V, vers 75.