Page:Chateaubriand - Mémoires d’outre-tombe t5.djvu/220

Cette page a été validée par deux contributeurs.
208
MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

documents relatifs au traité de Westphalie, de la paix de Munster ? Vous connaissez les dépêches de Barillon sur les affaires d’Angleterre ; les négociations pour la succession d’Espagne ne vous sont pas étrangères ; le nom de madame des Ursins ne vous a pas échappé ; le pacte de famille de M. de Choiseul est tombé sous vos yeux ; vous n’ignorez pas Ximenès, Olivarès et Pombal, Hugues Grotius sur la liberté des mers, ses lettres aux deux Oxenstiern, les négociations du grand-pensionnaire de Witt avec Pierre Grotius, second fils de Hugues ; enfin la collection des traités diplomatiques a peut-être attiré vos regards ? — Non.

Ainsi, vous n’avez rien lu de ces sempiternelles élucubrations ? Eh bien ! lisez-les ; quand cela sera fait, passez ma guerre d’Espagne dont le succès vous importune, bien qu’elle soit mon premier titre à mon classement d’homme d’État ; prenez mes dépêches de Prusse, d’Angleterre et de Rome, placez-les auprès des autres dépêches que je vous indique : la main sur la conscience, dites alors quelles sont celles qui vous ont le plus ennuyé ; dites si mon travail et celui de mes prédécesseurs n’est pas tout semblable ; si l’entente des petites choses et du positif n’est pas aussi manifeste de mon côté que du côté des ministres passés et des défunts ambassadeurs ?

D’abord vous remarquerez que j’ai l’œil à tout ; que je m’occupe de Reschid-Pacha[1] et de M. de Blacas ; que je défends contre tout venant mes privilèges et

  1. Mustapha Reschid-Pacha (1779-1857), l’homme d’État le plus remarquable qu’ait eu la Turquie au xixe siècle. Lors de l’ambassade de Chateaubriand à Rome, il était ministre des Affaires étrangères sous Mahmoud II. Il devint grand vizir sous Abdul-Medjid, et opéra d’importantes réformes.