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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

comme ministre des affaires étrangères, un passe-port à madame la comtesse de Survilliers[1], alors à Bruxelles, pour venir à Paris soigner un de ses parents malade. Vingt fois j’ai demandé le rappel de ces lois de persécution ; vingt fois j’ai dit à Louis XVIII que je voudrais voir le duc de Reichstadt capitaine de ses gardes et la statue de Napoléon replacée au haut de la colonne de la place Vendôme. J’ai rendu, comme ministre et comme ambassadeur, tous les services que j’ai pu à la famille Bonaparte. C’est ainsi que j’ai compris largement la monarchie légitime : la liberté peut regarder la gloire en face. Ambassadeur à Rome, j’ai autorisé mes secrétaires et mes attachés à paraître au palais de madame la duchesse de Saint-Leu ; j’ai renversé la séparation élevée entre des Français qui ont également connu l’adversité. J’ai écrit à M. le cardinal Fesch pour l’inviter à se joindre aux cardinaux qui devaient se réunir chez moi ; je lui ai témoigné ma douleur des mesures politiques qu’on avait cru devoir prendre ; je lui ai rappelé le temps où j’avais fait partie de sa mission auprès du Saint-Siège ; et j’ai prié mon ancien ambassadeur d’honorer de sa présence le banquet de son ancien secrétaire d’ambassade. J’en ai reçu cette réponse pleine de dignité, de discrétion et de prévoyance :

« Du palais Falconieri, 4 avril 1829.

« Le cardinal Fesch est bien sensible à l’invitation obligeante de M. de Chateaubriand, mais sa posi-

  1. Femme du roi Joseph, qui avait pris le nom de comte de Survilliers, comme son frère Louis avait pris le nom de comte de Saint-Leu, et son frère Jérôme celui de comte de Montfort.