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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

en effet fort sale.) Vous verrez que je ne suis pas un ennemi. » Je vous rapporte, monsieur le comte, ses propres paroles. Je lui répondis que j’étais bien loin de le regarder comme un ennemi. « À vous autres, reprit-il, il faut de l’eau et non pas du feu : ne connais-je pas votre pays ? n’ai-je pas vécu en France ? (Il parle français comme un Français.) Vous serez content et votre maître aussi. Comment se porte le roi ? Bonjour ! Allons à Saint-Pierre. »

« Il était huit heures du matin ; j’avais déjà vu Sa Sainteté et tout Rome courait à la cérémonie de l’adoration.

« Le cardinal Albani est un homme d’esprit, faux par caractère et franc par humeur ; sa violence déjoue sa ruse ; on peut en tirer parti en flattant son orgueil et satisfaisant son avarice.

« Pie VIII est très savant, surtout en matière de théologie ; il parle français, mais avec moins de facilité et de grâce que Léon XII. Il est attaqué sur le côté droit d’une demi-paralysie et sujet à des mouvements convulsifs : la suprême puissance le guérira. Il sera couronné dimanche prochain, jour de la Passion, 5 avril.

« Maintenant, monsieur le comte, que la principale affaire qui me retenait à Rome est terminée, je vous serai infiniment obligé de m’obtenir de la bienveillance de Sa Majesté un congé de quelques mois. Je ne m’en servirai qu’après avoir remis au pape la lettre par laquelle le roi répondra à celle que Pie VIII lui a écrite ou va lui écrire pour lui annoncer son élévation sur la chaire de Saint-Pierre. Permettez-moi de solliciter de nouveau en