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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

À M. THIERRY.
« Rome, ce 8 janvier 1829.

« J’ai été bien touché, monsieur, de recevoir la nouvelle édition de vos Lettres[1] avec un mot qui prouve que vous avez pensé à moi. Si ce mot était de votre main, j’espérerais pour mon pays que vos yeux se rouvriraient aux études dont votre talent tire un si merveilleux parti. Je lis, ou plutôt relis avec avidité cet ouvrage trop court. Je fais des cornes à toutes les pages, afin de mieux rappeler les passages dont je veux m’appuyer. Je vous citerai beaucoup, monsieur, dans le travail que je prépare depuis tant d’années sur les deux premières races. Je mettrai à l’abri mes idées et mes recherches derrière votre haute autorité ; j’adopterai souvent votre réforme des noms ; enfin j’aurai le bonheur d’être presque toujours de votre avis, en m’écartant, bien malgré moi sans doute, du système proposé par M. Guizot ; mais je ne puis, avec cet ingénieux écrivain, renverser les monuments les plus authentiques, faire de tous les Francs des nobles et des hommes libres, et de tous les Romains-Gaulois des esclaves des Francs. La loi salique et la loi ripuaire ont une foule d’articles fondés sur la différence des conditions entre les Francs : « Si quis ingenuus ingenuum ripuarium extra solum vendiderit, etc., etc. »

« Vous savez, monsieur, que je vous désirais vive-

  1. Lettres sur l’histoire de France pour servir d’Introduction à l’étude de cette histoire, par Augustin Thierry.