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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

« 4o Il est probable que la Prusse se réunirait plutôt à l’empereur Nicolas, gendre de Frédéric-Guillaume III, qu’aux ennemis de l’Empereur.

« 5o La France aurait tout à perdre et rien à gagner en s’alliant avec l’Angleterre et l’Autriche contre la Russie.

« 6o L’indépendance de l’Europe ne serait point menacée par les conquêtes des Russes en Orient. C’est une chose passablement absurde, c’est ne tenir compte d’aucun obstacle, que de faire accourir les Russes du Bosphore pour imposer leur joug à l’Allemagne et à la France : tout empire s’affaiblit en s’étendant. Quant à l’équilibre des forces, il y a longtemps qu’il est rompu pour la France ; — elle a perdu ses colonies, elle est resserrée dans ses anciennes limites, tandis que l’Angleterre, la Prusse, la Russie et l’Autriche se sont prodigieusement agrandies.

« 7o Si la France était obligée de sortir de sa neutralité, de prendre les armes pour un parti ou pour un autre, les intérêts généraux de la civilisation, comme les intérêts particuliers de notre patrie, doivent nous faire entrer de préférence dans l’alliance russe. Par elle nous pourrions obtenir le cours du Rhin pour frontières et des colonies dans l’Archipel, avantages que ne nous accorderont jamais les cabinets de Saint-James et de Vienne.

« Tel est le résumé de cette Note. Je n’ai pu raisonner qu’hypothétiquement ; j’ignore ce que l’Angleterre, l’Autriche et la Russie proposent ou ont proposé au moment même où j’écris ; il y a peut-être un renseignement, une dépêche qui réduisent