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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

Il est probable que Charles X, s’imaginant que l’archevêque m’avait entretenu de sa bonne volonté, attendait de moi un mot de remercîment et qu’il fut choqué de mon silence.

Ainsi j’ai assisté au dernier sacre des successeurs de Clovis ; je l’avais déterminé par les pages où j’avais sollicité le sacre[1], et dépeint dans ma brochure Le roi est mort : vive le roi ! Ce n’est pas que j’eusse la moindre foi à la cérémonie ; mais, comme tout manquait à la légitimité, il fallait pour la soutenir user de tout, vaille que vaille. Je rappelais cette définition d’Adalbéron[2] : « Le couronnement d’un roi de France est un intérêt public, non une affaire particulière : publica sunt hæc negotia, non privata ; » je citais l’admirable prière réservée pour le sacre : « Dieu, qui par tes vertus conseilles tes peuples, donne à celui-

  1. Chateaubriand avait dit, en effet, dans la brochure à laquelle il avait donné pour titre le vieux cri de la monarchie : Le roi est mort ! vive le Roi ! « Supplions humblement Charles X d’imiter ses aïeux : trente-deux souverains de la troisième race ont reçu l’onction royale, c’est-à-dire tous les souverains de cette race, hormis Jean Ier, qui mourut quatre jours après sa naissance, Louis XVII et Louis XVIII qui furent investis de la royauté, l’un dans la tour du Temple, l’autre sur la terre étrangère. Tous ces monarques furent sacrés à Reims : Henri IV le fut à Chartres, où l’on trouve encore dans les registres de la ville une dépense de 9 francs pour une pièce mise au pourpoint du roi : c’était peut-être à l’endroit du coup d’épée que le Béarnais reçut à la journée d’Aumale. » — Chateaubriand, en reproduisant cet écrit dans ses Œuvres complètes, ajoute la note suivante : « Je laisse ce paragraphe tel qu’il est, mais je dois dire que Louis le Gros fut sacré à Orléans. Henri et Louis le Gros ne furent pas sacrés à Reims ; le premier, parce que Reims était encore entre les mains de la Ligue, et le second parce que deux archevêques de Reims étaient en contestation pour le siège de cette métropole. »
  2. Archevêque de Reims. Ce fut lui qui sacra Hugues Capet.