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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

par les soldats du connétable de Bourbon, est du même sang que Napoléon Buonaparte, destructeur de tant de villes, maître de Rome changée en préfecture, roi d’Italie, dominateur de la couronne des Bourbons et geôlier de Pie VII, après avoir été sacré empereur des Français par la main de ce pontife. Le traducteur de l’ouvrage de Jacques Buonaparte est Napoléon-Louis Buonaparte, neveu de Napoléon, et fils du roi de Hollande, frère de Napoléon ; et ce jeune homme vient de mourir dans la dernière insurrection de la Romagne, à quelque distance des deux villes où la mère et la veuve de Napoléon sont exilées, au moment où les Bourbons tombent du trône pour la troisième fois.

Comme il aurait été assez difficile de faire de Napoléon le fils de Jupiter Ammon par le serpent aimé d’Olympias, ou le petit-fils de Vénus par Anchise, de savants affranchis[1] trouvèrent une autre merveille à leur usage : ils démontrèrent à l’empereur qu’il descendait en ligne directe du Masque de fer. Le gouverneur des îles Sainte-Marguerite se nommait Bonpart ; il avait une fille ; le Masque de fer, frère jumeau de Louis XIV, devint amoureux de la fille de son geôlier et l’épousa secrètement, de l’aveu même de la cour. Les enfants qui naquirent de cette union furent clandestinement portés en Corse, sous le nom de leur mère ; les Bonpart se transformèrent en Bonaparte par la différence du langage. Ainsi le Masque de fer serait devenu le mystérieux aïeul, à face de bronze, du grand homme, rattaché de la sorte au grand roi.

La branche des Franchini-Bonaparte porte sur son

  1. Las Cases. Ch.