faire seulement autour de son monument quelque apparition de fantôme. C’est pourquoi, comme s’il n’eût pensé à autre chose, il s’empressa de descendre dans ses carrières de fer cristallisé et d’aimant ; on l’eût pris pour l’ancien inspecteur des mines de ses ci-devant États. Il se repentit d’avoir affecté jadis le revenu des forges d’Illua à la Légion d’honneur ; 500 000 fr. lui semblaient alors mieux valoir qu’une croix baignée dans le sang sur la poitrine de ses grenadiers : « Où avais-je la tête ? dit-il ; mais j’ai rendu plusieurs stupides décrets de cette nature. » Il fit un traité de commerce avec Livourne et se proposait d’en faire un autre avec Gênes. Vaille que vaille, il entreprit cinq ou six toises de grand chemin et traça l’emplacement de quatre grandes villes, de même que Didon dessina les limites de Carthage. Philosophe revenu des grandeurs humaines, il déclara qu’il voulait vivre désormais comme un juge de paix dans un comté d’Angleterre : et pourtant, en gravissant un morne qui domine Porto-Ferrajo, à la vue de la mer lui s’avançait de tous côtés au pied des falaises, ces mots lui échappèrent : « Diable ! il faut l’avouer, mon île est très petite. » Dans quelques heures il eut visité son domaine ; il y voulut joindre un rocher appelé Pianosa. « L’Europe va m’accuser, dit-il en riant, « d’avoir déjà fait une conquête. » Les puissances alliées se réjouissaient de lui avoir laissé en dérision quatre cents soldats ; il ne lui en fallait pas davantage pour les rappeler tous sous le drapeau.
La présence de Napoléon sur les côtes de l’Italie, qui avait vu commencer sa gloire et qui garde son souvenir, agitait tout. Murat était voisin ; ses amis,