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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

buerait ni directement, ni indirectement, au rétablissement d’un royaume de Pologne : l’ancienne et la nouvelle France ont également abandonné ce fidèle et malheureux pays.

Cet abandon, entre toutes les fautes politiques commises par Bonaparte, est une des plus graves. Il a déclaré, depuis cette faute, que s’il n’avait pas procédé à un rétablissement hautement indiqué, c’est qu’il avait craint de déplaire à son beau-père. Bonaparte était bien homme à être retenu par des considérations de famille ! L’excuse est si faible qu’elle ne le mène, en la donnant, qu’à maudire son mariage avec Marie-Louise. Loin d’avoir senti ce mariage de la même manière, l’empereur de Russie s’était écrié : « Me voilà renvoyé au fond de mes forêts. » Bonaparte fut tout simplement aveuglé par l’antipathie qu’il avait pour la liberté des peuples.

Le prince Poniatowski[1], lors de la première invasion de l’armée française, avait organisé des troupes polonaises ; des corps politiques s’étaient assemblés ; la France maintint deux ambassadeurs successifs à Varsovie, l’archevêque de Malines[2] et M. Bi-

  1. Joseph, prince Poniatowski (1762-1813). Après avoir, dans la campagne de Russie, commandé le cinquième corps de la grande armée, composé des divisions polonaises Dombrowski, Zayouschek et Ficher, il commanda, pendant la campagne de Saxe, le 8e corps (Polonais).
  2. Dominique-Georges-Frédéric Dufour de Pradt (1759-1837). Député du clergé du bailliage de Caux à l’Assemblée constituante, il siégea au côté droit, émigra dès la fin de la session et s’établit à Hambourg, où il publia, en 1798, sous le voile de l’anonyme, un premier ouvrage, l’Antidote au Congrès de Rastadt, qui a été longtemps attribué à Joseph de Maistre. Après le 18 brumaire, son parent, le général Duroc, le présenta au premier Consul,