d’Alexandrie et de Mondovi, Pie VII gagna le premier village français ; il y fut accueilli avec des effusions de tendresse religieuse ; il disait : « Dieu pourrait-il nous ordonner de paraître insensible à ces marques d’affection ? »
Les Espagnols faits prisonniers à Saragosse étaient détenus à Grenoble : de même que ces garnisons d’Européens oubliées sur quelques montagnes des Indes, ils chantaient la nuit et faisaient retentir ces climats étrangers des airs de la patrie. Tout à coup le pape descend ; il semblait avoir entendu ces voix chrétiennes. Les captifs volent au-devant du nouvel opprimé ; ils tombent à genoux ; Pie VII jette presque tout son corps hors de la portière ; il étend ses mains amaigries et tremblantes sur ces guerriers qui avaient défendu la liberté de l’Italie avec l’épée, comme il avait défendu la liberté de l’Espagne avec la foi ; les deux glaives se croisent sur des têtes héroïques.
De Grenoble Pie VII atteignit Valence. Là, Pie VI avait expiré[1] ; là, il s’était écrié quand on le montra au peuple : « Ecce homo ! » Là, Pie VI se sépara de Pie VII ; le mort, rencontrant sa tombe, y rentra ; il fit cesser la double apparition, car jusqu’alors on avait vu comme deux papes marchant ensemble, ainsi que l’ombre accompagne le corps. Pie VII portait l’anneau
- ↑ Pie VI, traîné par le Directoire de prison en prison, avait été amené à Valence le 11 juillet 1799 ; il mourut dans cette ville le 29 août de la même année, en pardonnant à ceux qui depuis dix-huit mois l’avaient traité avec tant de lâcheté et de barbarie : « Recommandez surtout à mon successeur de pardonner aux Français comme je leur pardonne de tout mon cœur. » Comme lui, son successeur sera odieusement persécuté, et il pardonnera comme lui.