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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

Frédéric, fut rendue à la Prusse : on respectait le droit de l’ancienne injustice ; ce qui venait de la violence était sacré. Une partie des territoires polonais passa en souveraineté à la Saxe ; Dantzick fut rétabli dans son indépendance ; on compta pour rien les hommes tués dans ses rues et dans ses fossés : ridicules et inutiles meurtres de la guerre ! Alexandre reconnut la confédération du Rhin et les trois frères de Napoléon, Joseph, Louis et Jérôme, comme rois de Naples, de Hollande et de Westphalie.


Cette fatalité dont Bonaparte menaçait les rois le menaçait lui-même ; presque simultanément il attaque la Russie, l’Espagne et Rome : trois entreprises qui l’ont perdu. Vous avez vu dans le Congrès de Vérone[1], dont la publication a devancé celle de ces Mémoires, l’histoire de l’envahissement de l’Espagne. Le traité de Fontainebleau fut signé le 27 octobre 1807[2]. Junot

  1. Congrès de Vérone, guerre d’Espagne, négociations, colonies espagnoles, par M. de Chateaubriand. Deux volumes in-8o, 1838.
  2. Le traité entre la France et l’Espagne, signé à Fontainebleau, était destiné à demeurer secret. Il était fait trois parts du Portugal, — qui pourtant n’était pas encore conquis et ne devait jamais l’être entièrement. La partie nord, — sous le titre de Lusitanie septentrionale, était attribuée à la princesse Marie-Louise-Joséphine de Bourbon, et à son jeune fils, Charles-Louis de Bourbon, roi d’Étrurie, dont le royaume (l’ancien grand-duché de Toscane) était cédé à la France. — La partie sud (les Algarves et l’Alentejo) était donnée en souveraineté à Godoï (prince de la Paix), favori de la reine et du roi d’Espagne. — La partie centrale (les provinces de Beira, Tras os Montès, Estrémadure) devait être occupée par les troupes de Napoléon, mais s’il gardait ainsi en dépôt le centre et le cœur du Portugal, c’était uniquement, disait le traité, « pour en disposer à la paix générale ». On promettait au roi d’Espagne la moitié des colo-