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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

point encore Wellington. Mais l’Inde s’ébranle pour nous enlever notre conquête du Nil ; l’Égypte est attaquée par la mer Rouge, tandis que le Capitan-Pacha l’aborde par la Méditerranée[1]. Napoléon agite les empires ; toute la terre se mêlait de lui.


Les préliminaires de la paix entre la France et l’Angleterre, arrêtés à Londres le 1er octobre 1801, sont convertis en traité à Amiens[2]. Le monde napoléonien n’était point encore fixé ; ses limites changeaient avec la crue ou la décroissance des marées de nos victoires.

C’est à peu près alors que le premier consul nommait Toussaint-Louverture gouverneur à vie à Saint-Domingue, et incorporait l’île d’Elbe à la France[3], mais Toussaint, traîtreusement enlevé, devait mourir dans un château-fort du Jura[4] et Bonaparte se nantissait d’une prison à Porto-Ferrajo[5], afin de subvenir à l’empire du monde quand il n’y aurait plus de place.

  1. Le 25 mars 1801, le Capitan-Pacha débarqua à Aboukir, avec un corps nombreux de Turcs ; le 23 mai suivant, le général Baird débarquait à Kosséir, port d’Égypte, sur la mer Rouge, amenant de l’Inde 1 000 Anglais et 10 000 Cipayes.
  2. Le traité de paix d’Amiens entre les républiques française et batave et l’Espagne, d’une part ; l’Angleterre, d’autre part ; fut signé le 25 mars 1802. Il terminait une guerre de neuf années.
  3. Le 26 août 1802, l’île d’Elbe fut réunie au territoire français.
  4. Toussaint-Louverture, que Chateaubriand appelle ailleurs le Bonaparte noir, mourut au fort de Joux le 27 avril 1803.
  5. Porto-Ferrajo était la capitale de l’île d’Elbe. Napoléon y résidera du 4 mai 1814 au 26 février 1815 ; c’est de là qu’il appareillera pour débarquer au golfe Jouan et pour aller aux Tuileries, à Waterloo, à Sainte-Hélène.