Page:Chateaubriand - Mémoires d’outre-tombe t3.djvu/139

Cette page a été validée par deux contributeurs.
127
MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

Tout cela est mêlé de négociations avec les républiques nouvelles, des détails des fêtes pour Virgile et Arioste, des bordereaux explicatifs des vingt tableaux et des cinq cents manuscrits de Venise ; tout cela a lieu à travers l’Italie assourdie du bruit des combats, à travers l’Italie devenue une fournaise où nos grenadiers vivaient dans le feu comme des salamandres.

Pendant ces tourbillons d’affaires et de succès advint le 18 fructidor[1], favorisé par les proclamations de Bonaparte et les délibérations de son armée, en jalousie de l’armée de la Meuse. Alors disparut celui qui, peut-être à tort, avait passé pour l’auteur des plans des victoires républicaines ; on assure que Danissy, Lafitte, d’Arçon, trois génies militaires supérieurs, dirigeaient ces plans : Carnot se trouva proscrit par l’influence de Bonaparte.

Le 17 octobre, celui-ci signe le traité de paix de Campo-Formio[2] ; la première guerre continentale de la Révolution finit à trente lieues de Vienne.


Un congrès étant rassemblé à Rastadt, et Bonaparte ayant été nommé par le Directoire représentant à ce congrès[3], il prit congé de l’armée d’Italie. « Je ne se-

  1. Coup d’État du 18 fructidor an V (4 septembre 1797).
  2. Campo-Formio est un hameau du Frioul, près d’Udine. L’Autriche cédait à la France les Pays-Bas autrichiens, ainsi que les pays d’Empire jusqu’au Rhin ; elle reconnaissait la République cisalpine, à laquelle elle cédait Milan, Mantoue et Modène. L’État de Venise était abandonné à l’empereur, à la réserve des îles Ioniennes, que la France retenait.
  3. Bonaparte avait été nommé par le Directoire premier plénipotentiaire ; Treilhard et Bonnier d’Arco lui étaient adjoints. Les trois plénipotentiaires de l’Autriche étaient le comte de Metternich, père du futur chancelier, qui représentait l’Empe-