« Nous nous sommes embarqués le vendredi 1er août ; mais, le vent n’étant pas favorable pour sortir du port, nous y sommes restés jusqu’au lendemain à la pointe du jour. Alors le pilote du port est venu nous prévenir qu’il pouvait nous en sortir. Comme je n’avais jamais été sur mer, je m’étais fait une idée exagérée du danger, car je n’en voyais aucun pendant deux jours. Mais le troisième, il s’éleva une tempête ; les éclairs, le tonnerre, enfin un orage terrible nous assaillit et grossit la mer d’une façon effrayante. Notre équipage n’était composé que de huit matelots, d’un capitaine, d’un officier, d’un pilote et d’un cuisinier, et cinq passagers, compris Monsieur et moi, ce qui faisait en tout dix-sept hommes. Alors nous nous mîmes tous à aider aux matelots pour fermer les voiles, malgré la pluie dont nous fûmes bientôt traversés, ayant ôté nos habits pour agir plus librement. Ce travail m’occupait et me faisait oublier le danger qui, à la vérité, est plus effrayant par l’idée qu’on s’en forme qu’il ne l’est réellement. Pendant deux jours les orages se sont succédé, ce qui m’a aguerri dans mes premiers jours de navigation ; je n’étais aucunement incommodé. Monsieur craignait que je ne fusse malade en mer ; lorsque le calme fut rétabli, il me dit : « Me voilà rassuré sur votre santé ; puisque vous avez bien supporté ces deux jours d’orage, vous pouvez vous tranquilliser pour tout autre contretemps. » C’est ce qui n’a pas eu lieu dans le reste