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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

la région des orages. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Il y a des montagnes que je visiterais encore avec un plaisir extrême : ce sont celles de la Grèce et de la Judée. J’aimerais à parcourir les lieux dont mes nouvelles études me forcent de m’occuper chaque jour : j’irais volontiers chercher sur le Thabor et le Taygète d’autres couleurs et d’autres harmonies, après avoir peint les monts sans renommée et les vallées inconnues du Nouveau-Monde. » Cette dernière phrase annonçait le voyage que j’exécutai en effet l’année suivante, 1806.

À notre retour à Genève, sans avoir pu revoir madame de Staël à Coppet[1], nous trouvâmes les auberges encombrées. Sans les soins de M. de Forbin[2]

  1. « Je ne sais ce qui nous empêcha d’accomplir la promesse que nous avions faite à Mme de Staël (d’aller, à leur retour de Chamonix, passer quelques jours à Coppet). Elle en fut très mécontente ; et d’autant plus qu’ayant compté sur notre visite, elle écrivit d’avance, à Paris, les conversations présumées qu’elle avait eues avec M. de Chateaubriand, et dans lesquelles elle l’avait, disait-elle, converti à ses opinions politiques. On sut que nous n’avions point été à Coppet, et que la noble châtelaine avait fait seulement un roman de plus. » (Souvenirs de Mme de Chateaubriand.)
  2. Louis-Nicolas-Philippe-Auguste, comte de Forbin (1779-1841). Homme d’esprit et peintre habile, il a publié des récits de voyage et produit un grand ombre de tableaux, qui lui ouvrirent les portes de l’Académie des Beaux-Arts. Une de ses toiles, la Chapelle dans le Colisée à Rome, figure avec honneur au Louvre. Nommé par la Restauration directeur des Musées, il réorganisa et agrandit celui du Louvre, créa le Musée Charles X, consacré aux antiquités étrusques et égyptiennes, et fonda le musée du Luxembourg, destiné spécialement aux artistes vivants. En 1805, il était chambellan de la princesse Pauline Borghèse. Plus tard il composera pour la reine Hortense des romances que la reine mettra en musique. Selon le mot de l’auteur des Mémoires, « il tenait dans ses mains puissantes le cœur des princesses ». Si Chateaubriand parle ici