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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

partie habitée du château ; dans la partie habitée d’une prison ! Qui assistait donc à cette séance ? des geôliers, des soldats, des bourreaux. »

Nul ne pouvait donner des détails plus exacts sur le moment et le lieu du coup de foudre que M. le duc de Rovigo ; écoutons-le :

« Après le prononcé de l’arrêt, je me retirai avec les officiers de mon corps qui, comme moi, avaient assisté aux débats, et j’allai rejoindre les troupes qui étaient sur l’esplanade du château. L’officier qui commandait l’infanterie de ma légion vint me dire, avec une émotion profonde, qu’on lui demandait un piquet pour exécuter la sentence de la commission militaire : — Donnez-le, répondis-je. — Mais où dois-je le placer ? — Là où vous ne pourrez blesser personne. Car déjà les habitants des populeux environs de Paris étaient sur les routes pour se rendre aux divers marchés.

« Après avoir bien examiné les lieux, l’officier choisit le fossé comme l’endroit le plus sûr pour ne blesser personne. M. le duc d’Enghien y fut conduit par l’escalier de la tour d’entrée du côté du parc, et y entendit la sentence, qui fut exécutée. »

Sous ce paragraphe, on trouve cette note de l’auteur du mémoire : « Entre la sentence et son exécution, on avait creusé une fosse : c’est ce qui a fait dire qu’on l’avait creusée avant le jugement. »

Malheureusement, les inadvertances sont ici déplorables : « M. de Rovigo prétend, » dit M. Achille Roche, apologiste de M. de Talleyrand, « qu’il a obéi ! Qui lui a transmis l’ordre d’exécution ? Il parait que c’est un M. Delga, tué à Wagram. Mais que ce