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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

M. Molé[1] faisait refaire de petites chambres au second étage. Son père, tué révolutionnairement[2], était remplacé, dans un grand salon délabré, par un tableau dans lequel Matthieu Molé était représenté arrêtant une émeute avec son bonnet carré : tableau qui faisait sentir la différence des temps. Une superbe patte d’oie de tilleuls avait été coupée ; mais une des trois avenues existait encore dans la magnificence de son vieux ombrage ; on l’a mêlée depuis à de nouvelles plantations : nous en sommes aux peupliers.

Au retour de l’émigration, il n’y avait si pauvre banni qui ne dessinât les tortillons d’un jardin anglais dans les dix pieds de terre ou de cour qu’il avait retrouvés : moi-même, n’ai-je pas planté jadis la Vallée-aux-Loups ? N’y ai-je pas commencé ces Mémoires ? Ne les ai-je pas continués dans le parc de Montboissier,

    Consulat, à M. Molé, l’ami de Chateaubriand. En 1838, le comte Molé, alors président du conseil eut l’honneur de recevoir à Champlâtreux la visite du roi Louis-Philippe. — Le château de Champlâtreux appartient aujourd’hui à M. le duc de Noailles.

  1. Mathieu-Louis, comte Molé, né à Paris, le 24 janvier 1781. Ministre de la Justice sous Napoléon (20 novembre 1813 — 2 avril 1814) ; ministre de la Marine sous Louis XVIII (12 septembre 1817 — 28 décembre 1818), il fut appelé par Louis-Philippe, le 11 août 1830, au ministère des Affaires étrangères, qu’il conserva seulement jusqu’au 1er novembre de la même année. Le 6 septembre 1836, il reprit le portefeuille des Affaires étrangères, avec la présidence du Conseil, et cette fois il garda le pouvoir pendant près de trois ans, jusqu’au 30 mars 1839. Après 1848, il fut envoyé par les électeurs de la Gironde à l’Assemblée constituante et à l’Assemblée législative, où il fut l’un des chefs de la majorité conservatrice. Le 20 février 1840, il avait remplacé Mgr de Quéleu à l’Académie française. Il mourut à son château de Champlâtreux le 25 novembre 1855.
  2. Édouard-François-Mathieu Molé de Champlâtreux, président au Parlement de Paris, guillotiné le 1er floréal an II (20 avril 1794).