Page:Chateaubriand - Les Natchez, 1872.djvu/34

Cette page a été validée par deux contributeurs.


Je découvris à sa lumière un vieillard assis sur un rocher. (page 37, col. 2)
à Marie : il est assis sur une tombe immortelle, à travers laquelle il communique avec les hommes.

Marie, saisie d’un saint respect, touche à cet autel de l’Agneau ; elle y présente ses vœux et ceux de la terre, que le Christ à son tour va porter aux pieds du Père tout-puissant. Qui pourrait redire l’entretien de Marie et d’Emmanuel ? Si la femme a pour son enfant des expressions si divines, qu’étaient-ce que les paroles de la mère d’un Dieu, d’une mère qui avait vu mourir son fils sur la croix et qui le retrouvait vivant d’une vie éternelle ? Que devaient être aussi les paroles d’un fils et d’un Dieu ? Quel amour filial ! quels embrassements maternels ! Un seul moment d’une pareille félicité suffirait pour anéantir dans l’excès du bonheur tous les mondes.

Le Christ sort de son trône, avec un labarum de feu qui se forme soudainement dans sa main ; sa mère reste au sanctuaire de la croix. Marie elle-même ne pourrait entrer dans ces profondeurs du Père, où le Fils et l’Esprit se plongent. Dans le tabernacle le plus secret du Saint des saints sont les trois idées existantes d’elles-mêmes, exemplaires incréés de toutes les choses créées. Par un mystère inexplicable, le chaos se tient caché derrière Jéhovah. Lorsque Jéhovah veut former quelque monde, il appelle devant lui une petite partie de la matière, laissant le reste derrière lui ; car la matière s’animerait à la fois si elle était exposée aux regards de Dieu.

Une voix unique fait retentir éternellement une parole unique autour du Saint des saints. Que dit-elle ?

LIVRE CINQUIÈME

L’Éternel révéla à son Fils bien-aimé ses desseins sur l’Amérique : il préparait au genre humain, dans cette partie du monde, une rénovation d’existence. L’homme, s’éclairant par des lumières toujours