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le jour où Dieu, lâchant les rênes de l’univers, n’aura besoin pour le détruire que de l’abandonner.


CHAPITRE III.

Organisation des Animaux et des Plantes.



Descendons de ces notions générales à des idées particulières ; voyons si nous pouvons découvrir dans les parties de l’ouvrage cette même sagesse si bien exprimée dans le tout. Nous nous servirons d’abord du témoignage d’une classe d’hommes que les sciences et l’humanité réclament également ; nous voulons parler des médecins.

Le docteur Nieuwentyt, dans son Traité de l’Existence de Dieu[1], s’est attaché à démontrer la réalité des causes finales. Sans le suivre dans toutes ses observations, nous nous contenterons d’en rapporter quelques-unes.

En parlant des quatre éléments, qu’il considère dans leurs harmonies avec l’homme et la création en général, il fait voir, par rapport à l’air, comment nos corps sont miraculeusement conservés sous une colonne atmosphérique égale dans sa pression à un poids de vingt mille livres. Il prouve qu’une seule qualité changée, soit en raréfaction, soit en densité, dans l’élément qu’on respire, suffiroit pour détruire les êtres vivants. C’est l’air qui fait monter les fumées, c’est l’air qui retient les liquides dans les vaisseaux ; par ses mouvements il épure les cieux et porte aux continents les nuages de la mer.

Nieuwentyt démontre ensuite la nécessité de l’eau par une foule d’expériences. Qui n’admireroit le prodige de cet élément en ascension, contre les lois de la pesanteur, dans un élément plus léger que lui, afin de nous donner les pluies et les rosées ? La disposition des montagnes pour faire circuler les fleuves, la topographie de ces montagnes dans les îles et sur les continents, les ouvertures des golfes, des baies, des méditerranées, les innombrables utilités des mers, rien n’échappe à la sagacité de ce bon et savant homme. C’est de la même manière qu’il découvre l’excellence de la terre comme élément et ses

  1. Dans tout ce que nous citons ici du traité de Nieuwentyt, nous avons pris la liberté de refondre et d’animer un peu son sujet. Le docteur est savant, sage, judicieux, mais sec. Nous avons aussi mêlé quelques observations aux siennes.