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n’avaient point de poésie descriptive. Le christianisme rend au désert et ses tableaux et ses solitudes.

Le merveilleux chrétien peut soutenir le parallèle avec le merveilleux de la fable. Les anciens fondent leur poésie sur Homère, et les chrétiens sur la Bible ; et les beautés de la Bible surpassent les beautés d’Homère.

C’est au christianisme que les beaux-arts doivent leur renaissance et leur perfection.

En philosophie, il ne s’oppose à aucune vérité naturelle. S’il a quelquefois combattu les sciences, il a suivi l’esprit de son siècle et l’opinion des plus grands législateurs de l’antiquité.

En histoire, nous fussions demeurés inférieurs aux anciens sans le caractère nouveau d’images, de réflexions et de pensées qu’a fait naître la religion chrétienne : l’éloquence moderne fournit la même observation.

Restes des beaux-arts, solitudes des monastères, charmes des ruines, gracieuses dévotions du peuple, harmonies du cœur, de la religion et des déserts, c’est ce qui conduit à l’examen du culte.

Partout dans le culte chrétien la pompe et la majesté sont unies aux intentions morales, aux prières touchantes ou sublimes. Le sépulcre vit et s’anime dans notre religion : depuis le laboureur qui repose au cimetière champêtre jusqu’au roi couché à Saint-Denis, tout dort dans une poussière poétique. Job et David, appuyés sur le tombeau du chrétien, chantent tour à tour la mort aux portes de l’éternité.

Nous venons de voir ce que les hommes doivent au clergé séculier et régulier, aux institutions, au génie du christianisme.

Si Shoonbeck, Bonnani, Giustiniani et Hélyot avaient mis plus d’ordre dans leurs laborieuses recherches, nous pourrions donner ici le catalogue complet des services rendus par la religion à l’humanité. Nous commencerions par faire la liste des calamités qui accablent l’âme ou le corps de l’homme, et nous placerions sous chaque douleur l’ordre chrétien qui se dévoue au soulagement de cette douleur. Ce n’est point une exagération : un homme peut penser telle misère qu’il voudra, et il y a mille à parier contre un que la religion a deviné sa pensée et préparé le remède. Voici ce que nous avons trouvé après un calcul aussi exact que nous l’avons pu faire.

On compte à peu près sur la surface de l’Europe chrétienne quatre mille trois cents villes et villages.

Sur ces quatre mille trois cents villes et villages, trois mille deux cent quatre-vingt-quatorze sont de la première, de la seconde, de la troisième et de la quatrième grandeur.