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œuvres : des pleurs et de l’admiration sont tout ce qui nous reste. Qu’ils sont à plaindre, ceux qui veulent détruire la religion et qui ne goûtent pas la douceur des fruits de l’Evangile ! " Le stoïcisme ne nous a donné qu’un Epictète, dit Voltaire, et la philosophie chrétienne forme des milliers d’Epictètes qui ne savent pas qu’ils le sont et dont la vertu est poussée jusqu’à ignorer leur vertu même[1]. "


Chapitre V - Education. — Écoles, collèges, universités ; Bénédictins et Jésuites

Consacrer sa vie à soulager nos douleurs est le premier des bienfaits ; le second est de nous éclairer. Ce sont encore des prêtres superstitieux qui nous ont guéris de notre ignorance, et qui depuis dix siècles se sont ensevelis dans la poussière des écoles pour nous tirer de la barbarie. Ils ne craignaient pas la lumière, puisqu’ils nous en ouvraient les sources ; ils ne songeaient qu’à nous faire partager ces clartés qu’ils avaient recueillies, au péril de leurs jours, dans les débris de Rome et de la Grèce.

Le Bénédictin qui savait tout, le Jésuite qui connaissait la science et le monde, l’Oratorien, le docteur de l’université, méritent peut-être moins notre reconnaissance que ces humbles Frères qui s’étaient consacrés à l’enseignement gratuit des pauvres. " Les clercs réguliers des écoles pieuses s’obligeaient à montrer, par charité, à lire, à écrire au petit peuple, en commençant par l’a, b, c, à compter, à calculer, et même à tenir les livres chez les marchands et dans les bureaux. Ils enseignent encore non seulement la rhétorique et les langues latine et grecque, mais, dans les villes, ils tiennent aussi des écoles de philosophie et de théologie scolastique et morale, de mathématiques, de fortifications et de géométrie… Lorsque les écoliers sortent de classe, ils vont par bandes chez leurs parents, où ils sont conduits par un religieux, de peur qu’ils ne s’amusent par les rues à jouer et à perdre leur temps[2]. "

La naïveté du style fait toujours grand plaisir, mais quand elle s’unit, pour ainsi dire, à la naïveté des bienfaits, elle devient aussi admirable qu’attendrissante.

Après ces premières écoles fondées par la charité chrétienne, nous

  1. Corresp. gén., t, III, p. 222. (N.d.A.)
  2. Hélyot, t. IV, p. 307. (N.d.A.)