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temps dans une autre. Ainsi, quand nous parlerons des hôpitaux, des missions, des collèges de la France, il faut aussi se figurer les hôpitaux, les missions, les collèges de l’Italie, de l’Espagne, de l’Allemagne, de la Russie, de l’Angleterre, de l’Amérique, de l’Afrique et de l’Asie ; il faut voir deux cents millions d’hommes au moins chez qui se pratiquent les mêmes vertus et se font les mêmes sacrifices ; il faut se ressouvenir qu’il y a dix-huit cents ans que ces vertus existent et que les mêmes actes de charité se répètent : calculez maintenant, si votre esprit ne s’y perd, le nombre d’individus soulagés et éclairés par le christianisme chez tant de nations et pendant une aussi longue suite de siècles !


Chapitre II - Hôpitaux

La charité, vertu absolument chrétienne et inconnue des anciens, a pris naissance dans Jésus-Christ ; c’est la vertu qui le distingua principalement du reste des mortels, et qui fut en lui le sceau de la rénovation de la nature humaine. Ce fut par la charité, à l’exemple de leur divin Maître, que les apôtres gagnèrent si rapidement les cœurs et séduisirent saintement les hommes.

Les premiers fidèles, instruits dans cette grande vertu, mettaient en commun quelques deniers pour secourir les nécessiteux, les malades et les voyageurs : ainsi commencèrent les hôpitaux. Devenue plus opulente, l’Église fonda pour nos maux des établissements dignes d’elle. Dès ce moment les œuvres de miséricorde n’eurent plus de retenue : il y eut comme un débordement de la charité sur les misérables, jusque alors abandonnés sans secours par les heureux du monde. On demandera peut-être comment faisaient les anciens, qui n’avaient point d’hôpitaux ? Ils avaient pour se défaire des pauvres et des infortunés deux moyens que les chrétiens n’ont pas : l’infanticide et l’esclavage.

Les maladreries ou léproseries de Saint-Lazare semblent avoir été en Orient les premières maisons de refuge. On y recevait ces lépreux qui, renoncés de leurs proches, languissaient aux carrefours des cités, en horreur à tous les hommes. Ces hôpitaux étaient desservis par des religieux de l’ordre de Saint-Basile.

Nous avons dit un mot des Trinitaires, ou des pères de la Rédemption des captifs. Saint Pierre de Nolasque en Espagne imita saint Jean de Matha en France. On ne peut lire sans attendrissement les règles