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considération de leur zèle pour la religion et des avantages que ses sujets qui résident et qui trafiquent dans toutes les échelles reçoivent de leurs instructions, Sa Majesté les a retenus et retient pour ses chapelains dans l’église et chapelle consulaire de la ville d’Alep en Syrie, etc.

" Signé Louis.

" Et plus bas, Colbert[1]. "

C’est à ces mêmes missionnaires que nous devons l’amour que les sauvages portent encore au nom français dans les forêts de l’Amérique. Un mouchoir blanc suffit pour passer en sûreté à travers les hordes ennemies et pour recevoir partout l’hospitalité. C’étaient les Jésuites du Canada et de la Louisiane qui avaient dirigé l’industrie des colons vers la culture et découvert de nouveaux objets de commerce pour les teintures et les remèdes. En naturalisant sur notre sol des insectes, des oiseaux et des arbres étrangers[2], ils ont ajouté des richesses à nos manufactures, des délicatesses à nos tables et des ombrages à nos bois.

Ce sont eux qui ont décrit les annales élégantes ou naïves de nos colonies. Quelle excellente histoire que celle des Antilles par le père Dutertre, ou celle de la Nouvelle-France par Charlevoix ! Les ouvrages de ces hommes pieux sont pleins de toutes sortes de sciences : dissertations savantes, pointures de mœurs, plans d’amélioration pour nos établissements, objets utiles, réflexions morales, aventures intéressantes, tout s’y trouve ; l’histoire d’un acacia ou d’un saule de la Chine s’y mêle à l’histoire d’un grand empereur réduit à se poignarder, et le récit de la conversion d’un paria à un traité sur les mathématiques des brahmes. Le style de ces relations, quelquefois sublime, est souvent admirable par sa simplicité. Enfin, les missions fournissaient chaque année à l’astronomie, et surtout à la géographie, de nouvelles lumières. Un Jésuite rencontra en Tartarie une femme huronne qu’il avait connue au Canada : il conclut de cette étrange aventure que le continent de l’Amérique se rapproche au nord-ouest du continent de l’Asie, et il devina ainsi l’existence du détroit qui longtemps après a fait la gloire de Behring et de Cook. Une grande partie du Canada et toute la Louisiane avaient été découvertes par nos missionnaires. En appelant au christianisme les sauvages

  1. Lettres édifiantes, t. I, p. 129, édition de 1780. (N.d.A.)
  2. Deux moines, sous le règne de Justinien, apportèrent du Serinde des vers à soie à Constantinople. Les dindes, et plusieurs arbres et arbustes étrangers naturalisés en Europe, sont dus à des missionnaires. (N.d.A.)