Page:Chateaubriand - Œuvres complètes - Génie du christianisme, 1828.djvu/344

Cette page n’a pas encore été corrigée

Chrysostome. Il se tient presque toujours dans le ton mystique et dans la paraphrase de l’Ecriture[1].

Saint Grégoire de Nazianze[2], surnommé le Théologien, outre ses ouvrages en prose, nous a laissé quelques poèmes sur les mystères du christianisme.

" Il était toujours en sa solitude d’Arianze, dans son pays natal, dit Fleury : un jardin, une fontaine, des arbres qui lui donnaient du couvert, faisaient toutes ses délices. Il jeûnait, il priait avec abondance de larmes… Ces saintes poésies furent les occupations de saint Grégoire dans sa dernière retraite. Il y fait l’histoire de sa vie et de ses souffrances… Il prie, il enseigne, il explique les mystères et donne des règles pour les mœurs… Il voulait donner à ceux qui aiment la poésie et la musique des sujets utiles pour se divertir, et ne pas laisser aux païens l’avantage de croire qu’ils fussent les seuls qui pussent réussir dans les belles-lettres[3]. "

Enfin, celui qu’on appelait le dernier des Pères avant que Bossuet eût paru, saint Bernard, joint à beaucoup d’esprit une grande doctrine. Il réussit surtout à peindre les mœurs, et il avait reçu quelque chose du génie de Théophraste et de La Bruyère.

" L’orgueilleux, dit-il, a le verbe haut et le silence boudeur ; il est dissolu dans la joie, furieux dans la tristesse, déshonnête au dedans, honnête au dehors ; il est raide dans sa démarche, aigre dans ses réponses, toujours fort pour attaquer, toujours faible pour se défendre ; il cède de mauvaise grâce, il importune pour obtenir ; il ne fait pas ce qu’il peut et ce qu’il doit faire, mais il est prêt à faire ce qu’il ne doit pas et ce qu’il ne peut pas[4]. "

N’oublions pas cette espèce de phénomène du XIIIe siècle, le livre de l’Imitation de Jésus-Christ. Comment un moine renfermé dans son cloître a-t-il trouvé cette mesure d’expression, a-t-il acquis cette fine connaissance de l’homme au milieu d’un siècle où les passions étaient grossières et le goût plus grossier encore ? Qui lui avait révélé dans sa solitude ces mystères du cœur et de l’éloquence ? Un seul maître Jésus-Christ.


  1. On a de lui une lettre fameuse sur la solitude ; c’est la première de ses épîtres ; elle a servi de fondement à sa règle. (N.d.A.)
  2. Il avait un fils du même nom et de la même sainteté que lui. (N.d.A.)
  3. Fleury, Hist. Eccl., t. IV, liv. XIX, p. 557, chap. IX. (N.d.A.)
  4. De Mor., lib. XXXIV, cap. XVI. (N.d.A.)