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sentira plus couler sur lui ces flots du Jourdain, qui emportoient aux mers toutes ses souillures.

La Confession suit le Baptême, et l’Église, avec une prudence qu’elle seule possède, a fixé l’époque de la Confession à l’âge où l’idée du crime peut être conçue : il est certain qu’à sept ans l’enfant a les notions du bien et du mal. Tous les hommes, les philosophes mêmes, quelles qu’aient été d’ailleurs leurs opinions, ont regardé le sacrement de Pénitence comme une des plus fortes barrières contre le vice et comme le chef-d’œuvre de la sagesse. « Que de restitutions, de réparations, dit Rousseau, la confession ne fait-elle point faire chez les catholiques[1] ! » Selon Voltaire, « la confession est une chose très-excellente, un frein au crime, inventé dans l’antiquité la plus reculée. On se confessoit dans la célébration de tous les anciens mystères. Nous avons imité et sanctifié cette sage coutume : elle est très-bonne pour engager les cœurs ulcérés de haine à pardonner[2]. »

Sans cette institution salutaire, le coupable tomberoit dans le désespoir. Dans quel sein déchargeroit-il le poids de son cœur ? Seroit-ce dans celui d’un ami ? Eh ! qui peut compter sur l’amitié des hommes ? Prendra-t-il les déserts pour confidents ? « Les déserts retentissent toujours pour le crime du bruit de ces trompettes que le parricide Néron croyoit ouïr autour du tombeau de sa mère[3]. » Quand la nature et les hommes sont impitoyables, il est bien touchant de trouver un Dieu prêt à pardonner : il n’appartenoit qu’à la religion chrétienne d’avoir fait deux sœurs de l’innocence et du repentir.


CHAPITRE VII.

De la Communion.



C’est à douze ans, c’est au printemps de l’année, que l’adolescent s’unit à son Créateur. Après avoir pleuré la mort du Rédempteur du monde avec les montagnes de Sion, après avoir rappelé les ténèbres qui couvrirent la terre, la chrétienté sort de la douleur : les cloches se raniment ; les saints se dévoilent ; le cri de la joie, l’antique alleluia d’Abraham et de Jacob, fait retentir le dôme des églises. De jeunes filles vêtues de lin, et des garçons parés de feuillages, marchent sur une

  1. Émile, t. III, p. 204 ; dans la note.
  2. Questions encycl., t. III, p. 234, article Curé de campagne, sect. II.
  3. Tacit., Hist.