Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 7.djvu/292

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

DE
LA GUERRE D’ESPAGNE.
12 OCTOBRE 1823.


Le roi, dans son discours à l’ouverture de la dernière session, avoit dit :

« Si la guerre est inévitable, je mettrai tous mes soins à en resserrer le cercle, à en borner la durée ; elle ne sera entreprise que pour conquérir la paix que l’état de l’Espagne rendroit impossible.

« Que Ferdinand VII soit libre de donner à ses peuples les institutions qu’ils ne peuvent tenir que de lui, et qui en assurant leur repos dissiperoient les justes inquiétudes de la France, dès ce moment les hostilités cesseront : j’en prends devant vous, messieurs, le solennel engagement. »

Les paroles royales se sont accomplies ; et malgré les bruits que la malveillance avoit fait courir en sens divers, jamais on ne s’est écarté du principe posé par le roi, lors même qu’au prix de quelques concessions on pouvoit terminer une entreprise si importante au salut de la France et de l’Europe. Le premier drapeau ennemi que les soldats de la légitimité rencontrèrent fut le drapeau tricolore ; la révolution espagnole l’avoit pris pour enseigne et pour abri ; il annonçoit des principes et des victoires dont le moment étoit passé. Un seul coup de canon mit fin au prestige, et trente années d’illusion s’évanouirent.

Alors s’ouvrit cette campagne dont le plan, tracé par Mgr le duc d’Angoulême, fait l’admiration des hommes qui s’occupent de l’art militaire. La Catalogne eut son armée à part, où les généraux Damas, Donnadieu, Curial, d’Éroles, sous les ordres d’un vieux maréchal plein d’honneur, ont montré tout ce que peuvent l’activité, la patience et le courage. En même temps les places fortes de la Navarre et des Biscayes furent masquées par les généraux Hohenlohe, Canuel et d’Espagne. Les provinces en deçà de l’Èbre étant ainsi occupées, deux colonnes