Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 7.djvu/270

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

François ; que l’administration soit économe sans être mesquine ; qu’elle soit surtout ferme, surveillante et animée.

« Sire, disois-je au roi dans mon Rapport fait à Gand, éviter les excès de Buonaparte, ne pas trop multiplier, à son exemple, les actes administratifs, étoit une pensée sage et utile. Cependant, depuis vingt-cinq ans les François s’étoient accoutumés au gouvernement le plus actif que l’on ait jamais vu chez un peuple : les ministres écrivoient sans cesse ; des ordres partoient de toutes parts ; chacun attendoit toujours quelque chose ; le spectacle, l’acteur, le spectateur, changeoient à tous les moments. Quelques personnes semblent donc croire qu’après un pareil mouvement, détendre trop subitement les ressorts seroit dangereux. C’est, disent-elles, laisser des loisirs à la malveillance, nourrir les dégoûts, exciter des comparaisons inutiles. L’administrateur secondaire, accoutumé à être conduit dans les choses même les plus communes, ne sait plus ce qu’il doit faire, quel parti prendre. Peut-être seroit-il bon, dans un pays comme la France, si longtemps enchanté par les triomphes militaires, d’administrer vivement dans le sens des institutions civiles et politiques, de s’occuper ostensiblement des manufactures, du commerce, de l’agriculture, des lettres et des arts. De grands travaux commandés, de grandes récompenses promises, des prix, des distinctions éclatantes accordées aux talents, des concours publics, donneroient une autre tendance aux mœurs, une autre direction aux esprits. Le génie du prince, particulièrement formé par le règne des arts, répandroit sur eux un éclat immortel. Certains de trouver dans leur roi le meilleur juge, le politique le plus habile, l’homme d’État le plus instruit, les François ne craindroient plus d’embrasser une nouvelle carrière. Les triomphes de la paix leur feroient oublier les succès de la guerre ; ils croiroient n’avoir rien perdu en changeant laurier pour laurier, gloire pour gloire. »

Les sessions des chambres doivent être courtes, mais rapprochées. Que les projets de loi soient préparés d’avance avec soin. On apprendra un jour à les resserrer comme en Angleterre. C’est un vice capital de notre législation que les articles innombrables de nos projets de loi : ils amènent de force des discussions interminables et des amendements sans fin. Quand les chambres ne seront plus contrariées, loin d’entraver, elles accroîtront la force et l’action du gouvernement.

Je ne poursuivrai pas plus loin les développements de mon système. J’ai déjà signalé les principes les plus utiles dans les premiers chapitres de cet écrit. Il me resteroit encore beaucoup de choses à indi-