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libéralisme. Mais les doctrines constitutionnelles ont enfin armé la chambre actuelle des députés ; mais cette chambre veut à la fois la liberté et la religion, la constitution et le roi légitime : furieux contre ce résultat de vingt-cinq ans de rébellion, ils ne veulent plus de la chambre. Alors il faut déclamer contre le gouvernement représentatif, parce qu’ils sont arrêtés par sa vigilance ; contre la liberté de la presse, qui ne seroit plus à leur profit, quittes à reprendre les principes libéraux lorsque la dynastie sera changée et qu’on n’aura plus à craindre le rétablissement des autels.

Il faut convenir que la chambre des députés a fait deux choses qui ont dû la faire prendre en horreur aux partisans du système des intérêts révolutionnaires. En bannissant les régicides, en arrêtant la vente des domaines nationaux, elle a arrêté la révolution : comment jamais lui pardonner ?

Aussi que n’a-t-on point tenté pour la détruire après l’avoir tant calomniée ! Élue par les collèges électoraux, choisie parmi les plus grands propriétaires de la France, dans tous les rangs de la société, n’a-t-on pas voulu persuader aux étrangers qu’il n’y avoit personne aux collèges électoraux qui l’ont élue, et qu’elle n’est composée que d’émigrés sans propriétés ? Quel bonheur si au lieu de ces députés fanatiques, qui n’entendent qu’au nom de Dieu et du roi, on avoit pu avoir des révolutionnaires éclairés, souples, qui, rampant sous l’autorité, n’auroient opposé aucune résistance aux volontés des ministres jusqu’au jour où, tout étant arrangé, ils auroient déclaré, au nom du peuple souverain, que le peuple vouloit changer son maître !

Mille projets ont été formés pour se débarrasser de la chambre : tantôt on vouloit la dissoudre : mais il n’y a pas de loi d’élections ; tantôt on prétendoit en renvoyer un cinquième : mais comment régler les séries ? Et d’ailleurs gagneroit-on quelque chose à cette foible réélection ? Enfin, la passion a été poussée si loin, qu’on a rêvé l’ajournement indéfini des chambres, la suspension de la Charte et la continuation de l’impôt par des ordonnances. Nous avons vu dans le journal officiel de la police l’éloge d’un ministère étranger qui a remis à un autre temps la constitution promise, qui gouverne seul avec une modération parfaite, paye scrupuleusement les dettes de l’État, et se fait adorer du peuple. Entendez-vous, peuple françois, peuple grossier ?

...Quoi ! toujours les plus grandes merveilles
Sans ébranler ton cœur frapperont tes oreilles !

Une chambre de bons jacobins, qu’on appelleroit des modérés, ou point de chambres, voilà le système du parti. Dans l’une ou l’autre