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cessibilité à la couronne : je me donnerai garde d’entrer dans les développements de cette opinion criminelle.

Qui veut-on mettre sur le trône à la place des Bourbons ? À cet égard les avis sont partagés, mais ils s’accordent tous sur la nécessitè de déposséder la famille légitime. Les Stuarts sont l’exemple cité : l’histoire les tente. Sans l’échafaud de Charles Ier, la France n’auroit point vu celui de Louis XVI : tristes imitateurs, vous n’avez pas même inventé le crime !

Comment puis-je prouver qu’une doctrine aussi épouvantable est mystérieusement voilée sous le système des intérêts révolutionnaires ?

Il me suffit de jeter un coup d’œil sur les pamphlets et les journaux des Cent Jours.

J’ai lu depuis, et d’autres ont lu comme moi, des écrits qui ne laissent rien dans l’ombre, pas même le nom. Dans les épanchements de la table, ou dans la chaleur de la discussion, autre sorte d’ivresse, la franchise et la légèreté se sont souvent trahies.

Mais quand les preuves directes me manqueroient pour être convaincu, je n’aurois qu’à regarder ce qui se passe autour de moi : partout où j’observe un plan uniforme dont les parties se lient et se coordonnent entre elles, je suis forcé de convenir que ce dessin régulier n’a pu être tracé par les caprices du hasard : une conséquence me fait chercher un principe, et par la nature de l’effet j’arrive à connoître le caractère de la cause.

Marquons le but et suivons la marche de la conspiration.

CHAPITRE XXXVII.
BUT ET MARCHE DE LA CONSPIRATION.
ELLE DIRIGE SES PREMIERS EFFORTS CONTRE LA FAMILLE ROYALE.

Ce que j’appelle la conspiration des intérêts moraux révolutionnaires a pour but principal de changer la dynastie, pour but secondaire d’imposer au nouveau souverain les conditions que l’on vouloit faire subir au roi à Saint-Denis : prendre la cocarde tricolore, se reconnoître roi par la grâce du peuple, rappeler l’armée de la Loire et les représentants de Buonaparte, si ceux-ci existent encore au moment de l’événement. Ce projet, qui n’a jamais été abandonné, va sortir tout entier de l’observation des faits placés sous nos yeux.

Il est convenu qu’on parlera du roi comme les royalistes mêmes ; qu’on reconnoîtra en lui ces hautes vertus, ces lumières supérieures