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régulier, ce qu’ils possédoient de facultés pour le mal est devenu inutile. Ils sont pour ainsi dire morts au milieu du monde nouveau qui s’est formé autour d’eux ; et nous ne voyons plus errer parmi nous que leurs ombres ou leurs cadavres inanimés.

CHAPITRE XXXIV.
QUE LE SYSTÈME DES INTÉRÊTS RÉVOLUTIONNAIRES, AMENANT INDIRECTEMENT LE RENVERSEMENT DE LA CHARTE, MENACE DE DESTRUCTION LA MONARCHIE LÉGITIME.

Je crois avoir démontré que le système des intérêts révolutionnaires ne s’appuie que sur des principes erronés ; qu’en le suivant on a été obligé de se jeter dans les hérésies les plus inconstitutionnelles ; que les mesures administratives prises en conséquence de ce système ont amené des oppositions, résultat inévitable de l’ordre faux dans lequel on a placé les choses et les hommes.

Ce n’est pas tout : je n’ai considéré jusque ici que le peu de solidité du système ; je vais en faire voir le danger.

Il conduit d’abord indirectement à la subversion de la Charte ; car si nous avons toujours, comme on doit l’espérer, des députés courageux et libres, ils combattront les maximes révolutionnaires ; et pour se débarrasser de ces surveillants importuns, il faudra bien violer la constitution. Aussi, qu’est-ce que les ministériels ne disent point de la Charte, même à la tribune ? Comme ils l’expliquent et l’interprètent ! à quoi ne la réduiroient-ils point s’ils étoient les maîtres ! Et pourtant, à les entendre, c’est nous qui ne sommes pas constitutionnels ; c’est moi peut-être qui ne veux pas de la Charte !

Quand le système des intérêts révolutionnaires ne produiroit que la destruction du plus bel ouvrage du roi, ce seroit déjà, je pense, un assez grand mal ; mais je soutiens de plus que c’est un des principaux moyens employés par la faction révolutionnaire pour renverser de nouveau la monarchie légitime.

Il faut parler : le temps des ménagements est passé. Puissé-je être un prophète menteur ! Puissent mes alarmes n’avoir d’autre source que l’excès de mon amour pour mon roi, pour son auguste famille ! Mais dussé-je attirer sur ma tête les haines de parti, les fureurs des intérêts personnels, j’aurai le courage de tout dire. Si je me fais illusion, s’il n’y a pas de danger, le vent emportera mes paroles ; s’il y a,