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une ville, un village ou un hameau de Washington, touchante unanimité de la reconnoissance d’un peuple.

L’Ohio arrose maintenant quatre États : le Kentucky, l’Ohio proprement dit, l’Indiana et l’Illinois. Trente députés et huit sénateurs sont envoyés au congrès par ces quatre États. La Virginie et le Tennessée touchent l’Ohio sur deux points ; il compte sur ses bords cent quatrevingt-onze comtés et deux cent huit villes. Un canal que l’on creuse au partage de ses rapides, et qui sera fini dans trois ans, rendra le fleuve navigable pour de gros vaisseaux jusqu’à Pittsbourg.

Trente-trois grandes routes sortent de Washington, comme autrefois les voies romaines partoient de Rome, et aboutissent, en se partageant, à la circonférence des États-Unis. Ainsi on va de Washington à Dover, dans la Delaware ; de Washington à la Providence, dans le Rhode-lsland ; de Washington à Robbinstown, dans le district du Maine, frontière des États britanniques au nord ; de Washington à Concorde ; de Washington à Montpellier, dans le Connecticut ; de Washington à Albany, et de là à Montréal et à Québec ; de Washington au Havre de Sackets, sur le lac Ontario ; de Washington à la chute et au fort de Niagara ; de Washington, par Pittsbourg, au détroit et à Michilimakinac, sur le lac Érié ; de Washington, par Saint-Louis sur le Mississipi, à Councile-Bluffs du Missouri ; de Washington à la Nouvelle-Orléans et à l’embouchure du Mississipi ; de Washington aux Natchez ; de Washington à Charlestown, à Savannah et à Saint-Augustin, le tout formant une circulation intérieure de routes de vingt-cinq mille sept cent quarante-sept milles.

On voit, par les points où se lient ces routes, qu’elles parcourent des lieux naguère sauvages, aujourd’hui cultivés et habités. Sur un grand nombre de ces routes, les postes sont montées : des voitures publiques vous conduisent d’un lieu à l’autre à des prix modérés. On prend la diligence pour l’Ohio ou pour la chute de Niagara, comme, de mon temps, on prenoit un guide ou un interprète indien. Des chemins de communication s’embranchent aux voies principales, et sont également pourvus de moyens de transport. Ces moyens sont presque toujours doubles ; car des lacs et des rivières se trouvant partout, on peut voyager en bateaux à rames et à voiles, ou sur des bateaux à vapeur.

Des embarcations de cette dernière espèce font des passages réguliers de Boston et de New-York à la Nouvelle-Orléans ; elles sont pareillement établies sur le lac du Canada, l’Ontario, l’Érié, le Michigan, le Champlain, sur ces lacs où l’on voyoit à peine il y a trente ans quelques pirogues de sauvages, et où des vaisseaux de ligne se livrent maintenant des combats.