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Cette carte a vingt-et-un pieds de long sur un pied de large ; c’est une zone ou un grand chemin du monde antique.

Voilà à quoi se réduisoient les travaux et les connoissances des voyageurs et des géographes avant l’apparition de l’ouvrage de Ptolémée. Le monde d’Homère étoit une île parfaitement ronde, entourée, comme nous l’avons dit, du fleuve Océan. Hérodote fit de ce monde une plaine sans limites précises, Eudoxe de Cnide le transforma en un globe d’à peu près treize mille stades de diamètre ; Hipparque et Strabon lui donnèrent deux cent cinquante-deux mille stades de circonférence, de huit cent trente-trois stades au degré. Sur ce globe on traçoit un carré, dont le long côté couroit d’occident en orient ; ce carré étoit divisé par deux lignes, qui se coupoient à angle droit : l’une, appelée le diaphragme, marquoit de l’ouest à l’est la longueur ou la longitude de la terre ; elle avoit soixante-dix-sept mille huit cents stades ; l’autre, d’une moitié plus courte, indiquoit du nord au sud la largeur ou la latitude de cette terre ; les supputations commencent au méridien d’Alexandrie. Par cette géographie, qui faisoit la terre beaucoup plus longue que large, on voit d’où nous sont venues ces expressions impropres de longitude et de latitude.

Dans cette carte du monde habité se plaçoient l’Europe, l’Asie et l’Afrique : l’Afrique et l’Asie se joignoient aux régions australes, ou étoient séparées par une mer qui raccourcissoit extrêmement l’Afrique. Au nord les continents se terminoient à l’embouchure de l’Elbe, au sud vers les bords du Niger, à l’ouest au cap Sacré en Espagne, et à l’est aux bouches du Gange ; sous l’équateur une zone torride, sous les pôles une zone glacée, étoient réputées inhabitables.

Il est curieux de remarquer que presque tous ces peuples appelés barbares, qui firent la conquête de l’empire romain et d’où sont sorties les nations modernes, habitoient au delà des limites du monde connu de Pline et de Strabon, dans des pays dont on ne soupçonnoit pas même l’existence.

Ptolémée, qui tomba néanmoins dans de graves erreurs, donna des bases mathématiques à la position des lieux. On voit paroître dans son travail un assez grand nombre de nations sarmates. Il indique bien le Volga, et redescend jusqu’à la Vistule.

En Afrique il confirme l’existence du Niger, et peut-être nomme-t-il Tombouctou dans Tucabath ; il cite aussi un grand fleuve qu’il appelle Gyr.

En Asie, son pays des Sines n’est point la Chine, mais probablement le royaume de Siam. Ptolémée suppose que la terre d’Asie, se prolongeant vers