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Des nations nombreuses que Ferdinand de Soto rencontra dans les Florides (et il faut comprendre sous ce nom tout ce qui forme aujourd’hui les États de la Géorgie, de l’Alabama, du Mississipi et du Tennessée), il ne reste plus que les Creeks, les Çhéroquois et les Chicassais[1].

Les Creeks, dont j’ai peint les anciennes mœurs, ne pourroient mettre sur pied dans ce moment deux mille guerriers. Des vastes pays qui leur appartenoient, ils ne possèdent plus qu’environ huit milles carrés dans l’État de Géorgie, et un territoire à peu près égal dans l’Alabama. Les Çhéroquois et les Chicassais, réduits à une poignée d’hommes, vivent dans un coin des États de Géorgie et de Tennessée ; les derniers, sur les deux rives du fleuve Hiwassée.

Tout foibles qu’ils sont, les Creeks ont combattu vaillamment les Américains dans les années 1813 et 1814. Les généraux Jackson, White, Clayborne, Floyd, leur firent éprouver de grandes pertes à Talladega, Hillabes, Autossées, Bécanachaca, et surtout à Entonopeka. Ces sauvages avoient fait des progrès sensibles dans la civilisation, et surtout dans l’art de la guerre, employant et dirigeant très-bien l’artillerie. Il y a quelques années qu’ils jugèrent et mirent à mort un de leurs micos, ou rois, pour avoir vendu des terres aux blancs sans la participation du conseil national.

Les Américains, qui convoitent le riche territoire où vivent encore les Moscogulges et les Siminoles, ont voulu les forcer à le leur céder pour une somme d’argent, leur proposant de les transporter ensuite à l’occident du Missouri. L’État de Géorgie a prétendu qu’il avoit acheté ce territoire ; le congrès américain a mis quelque obstacle à cette prétention ; mais tôt ou tard les Creeks, les Chéroquois et les Chicassais, serrés entre la population blanche du Mississipi, du Tennessée, de l’Alabama et de la Géorgie, seront obligés de subir l’exil ou l’extermination.

En remontant le Mississipi, depuis son embouchure jusqu’au confluent de l’Ohio, tous les sauvages qui habitoient ces deux bords, les Biloxis, les Torimas, les Kappas, les Sotouïs, les Bayagoulas, les Colapissas, les Tansas, les Natchez et les Yazous ne sont plus.

Dans la vallée de l’Ohio, les nations qui erroient encore le long de cette rivière et de ses affluents se soulevèrent en 1810 contre les Amé-

  1. On peut consulter avec fruit, pour la Floride, un ouvrage intitulé : Vue de la Floride occidentale, contenant sa géographie, sa topographie, etc., suivie d’un appendice sur ses antiquités, les titres de concession des terres et des canaux, et accompagnée d’une carte de la côte, des plans de Pensacola et de l’entrée du port ; Philadelphie,  1817.