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tote, Alexandre le Grand, alloit porter le nom de cette Grèce jusque sur les rivages de l’Inde. Les conquêtes d’Alexandre opérèrent une révolution dans les sciences comme chez les peuples.

Androstène, Néarque et Onésicritus reconnurent les côtes méridionales de l’Asie. Après la mort du fils de Philippe, Séleucus Nicanor pénétra jusqu’au Gange ; Patrocle, un de ses amiraux, navigua sur l’océan Indien. Les rois grecs de l’Égypte ouvrirent un commerce direct avec l’Inde et la Taprobane ; Plolémée Philadelphe envoya dans l’Inde des géographes et des flottes ; Timosthène publia une description de tous les ports connus, et Ératosthène donna des bases mathématiques à un système complet de géographie. Les caravanes pénétroient ainsi dans l’Inde par deux routes : l’une se terminoit à Palibothra en descendant le Gange ; l’autre tournoit les monts Imaüs.

L’astronome Hipparque annonça une grande terre qui devoit joindre l’Inde à l’Afrique : on y verra si l’on veut l’univers de Colomb.

La rivalité de Rome et de Carthage rendit Polybe voyageur, et lui fit visiter les côtes de l’Afrique jusqu’au mont Atlas, afin de mieux connoître le peuple dont il vouloit écrire l’histoire. Eudoxe de Cyzique tenta, sous le règne de Ptolémée Physcon et de Ptolémée Lathyre, de faire le tour de l’Afrique par l’ouest ; il chercha aussi une route plus directe pour passer des ports du golfe Arabique aux ports de l’Inde.

Cependant les Romains, en étendant leurs conquêtes vers le nord, levèrent de nouveaux voiles : Pythéas de Marseille avoit déjà touché à ces rivages d’où devoient venir les destructeurs de l’empire des Césars. Pythéas navigua jusque dans les mers de la Scandinavie, fixa la position du cap Sacré et du cap Calbium (Finistère) en Espagne, reconnut l’île Uxisama (Ouessant), celle d’Albion, une des Cassitérides des Carthaginois, et surgit à cette fameuse Thulé dont on a voulu faire l’Islande, mais qui, selon toute apparence, est la côte du Jutland.

Jules César éclaircit la géographie des Gaules, commença la découverte de la Germanie et des côtes de l’île des Bretons : Germanicus porta les aigles romaines aux rives de l’Elbe.

Strabon, sous le règne d’Auguste, renferma dans un corps d’ouvrage les connoissances antérieures des voyageurs et celles qu’il avoit lui-même acquises. Mais si sa géographie enseigne des choses nouvelles sur quelque partie du globe, elle fait rétrograder la science sur quelques points : Strabon distingue les îles Cassitérides de la Grande-Bretagne, et il a l’air de croire que les premières (qui ne peuvent être dans cette hypothèse que les Sorlin-