Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 5.djvu/496

Cette page n’a pas encore été corrigée

célèbre tous les ans dans le Temple en l’honneur de Dieu, cria : " Voix du côté de l’orient ; voix du côté de l’occident ; voix du côté des quatre vents ; voix contre Jérusalem et contre le Temple ; voix contre les nouveaux mariés et les nouvelles mariées ; voix contre tout le peuple. " Et il ne cessait point, jour et nuit, de courir par toute la ville en répétant la même chose. Quelques personnes de qualité, ne pouvant souffrir les paroles d’un si mauvais présage, le firent prendre et extrêmement fouetter. (…)

" Mais à chaque coup qu’on lui donnait, il répétait d’une voix plaintive et lamentable : " Malheur ! malheur sur Jérusalem ! " (…)

" Quand Jérusalem fut assiégée, on vit l’effet de ses prédictions. Et faisant alors le tour des murailles de la ville, il se mit encore à crier : " Malheur ! malheur sur la ville ! malheur sur le peuple ! malheur sur le Temple ! "

A quoi ayant ajouté : " et malheur sur moi ! " une pierre poussée par une machine le porta par terre, et il rendit l’esprit en proférant ces mêmes mots. " (N.d.A.)



" On verra, dit encore Massillon, le Fils de l’Homme parcourant des yeux, du haut des airs, les peuples et les nations confondus et assemblés à ses pieds, relisant dans ce spectacle l’histoire de l’univers, c’est-à-dire des passions ou des vertus des hommes : on le verra rassembler ses élus des quatre vents, les choisir de toute langue, de tout état, de toute nation. réunir les enfants d’Israël dispersés dans l’univers ; exposer l’histoire sécrète d’un peuple saint et nouveau ; produire sur la scène des héros de la foi jusque là inconnus au monde ; ne plus distinguer les siècles par les victoires des conquérants, par l’établissement ou la décadence des empires, par la politesse ou la barbarie des temps, par les grands hommes qui ont paru dans chaque âge, mais par les divers triomphes de la grâce, par les victoires cachées des justes sur leurs passions, par l’établissement de son règne dans un cœur, par la fermeté héroïque d’un fidèle persécuté.

" La disposition de l’univers ainsi ordonnée ; tous les peuples de la terre ainsi séparés ; chacun immobile à la place qui lui sera tombée en partage ; la surprise, la terreur, le désespoir, la confusion, peints sur le visage des uns ; sur celui des autres la joie, la sérénité, la confiance ; les yeux des justes levés en haut vers le Fils de l’Homme, d’où ils attendent leur délivrance, ceux des impies fixés d’une manière affreuse sur la terre, et perçant presque les abîmes de leurs regards, comme pour y marquer déjà la place qui leur est destinée. "