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ce qui se faisait dans l’intérieur du port. Les marchands, de même, n’avoient aucune vue sur les vaisseaux de guerre, les deux ports étant séparés par une double muraille, et il y avait dans chacun une porte particulière pour entrer dans la ville sans passer par l’autre port. On peut donc distinguer trois parties dans Carthage : le port qui était double, appelé quelquefois Cothon, à cause de la petite île de ce nom ; la citadelle, appelée Byrsa ; la ville proprement dite, où demeuraient les habitants, qui environnait la citadelle et était nommée Mégara. "

Il ne resta vraisemblablement de cette première ville que les citernes publiques et particulières ; elles sont d’une beauté surprenante et donnent une grande idée des monuments des Carthaginois ; mais je ne sais si l’aqueduc qui conduisait l’eau à ces citernes ne doit pas être attribué à la seconde Carthage. Je me fonde, pour la destruction entière de la cité de Didon, sur ce passage de Florus : " Quanta urbs deleta sit, ut de caeteris taceam, vel ignium mora probari potest. Quippe per continuos XVII dies vix potuit incendium exstingui, quod domibus ac templis suis sponte hostes immiserant, ut quatenus urbs eripi Romanis non poterat, triumphus arderet. "

Appien ajoute que ce qui échappa aux flammes fut démoli par ordre du sénat romain. " Rome, dit Velléius Paterculus, déjà maîtresse du monde, ne se croyait pas en sûreté tant que subsisterait le nom de Carthage ", si nomen usquam maneret Carthaginis.

Strabon, dans sa description courte et claire, mêle évidemment différentes parties de l’ancienne et de la nouvelle cité :

Καί Καρχηδὼυ δέ ἐπί χεῥῥουὴσου τινὸς ἰδρυται, (…) etc
" Carthage, environnée de murs de toutes parts, occupe une presqu’île de trois cents stades de tour, qu’elle a attachée à la terre ferme par un isthme de soixante stades de largeur. Au milieu de la ville s’élevait une colline sur laquelle était bâtie une citadelle appelée Byrsa. Au sommet de cette citadelle on voyait un temple consacré à Esculape, et des maisons couvraient la pente de la colline, Les ports sont au pied de Byrsa, ainsi que la petite île ronde appelée Cothon, autour de laquelle les vaisseaux forment un cercle. "

Sur ce mot Karchêdôn de l’original, j’observe, après quelques écrivains, que, selon Samuel Bochard, le nom phénicien de Carthage était Cartha-Hadath ou Cartha-Hadtha, c’est-à-dire la nouvelle ville. Les Grecs en firent Karchêdôn, et les Romains Carthage. Les noms des trois parties de la ville étaient également tirés du phénicien, Magara de