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Si les fidèles n’avaient plus alors, pour célébrer leurs fêtes, la jouissance du Calvaire, du Saint-Sépulcre et de Bethléem, ils ne pouvaient toutefois perdre la mémoire de ces sanctuaires : les idoles leur en marquaient la place. Bien plus, les païens mêmes espéraient que le temple de Vénus, élevé au sommet du Calvaire, n’empêcherait pas les chrétiens de visiter cette colline sacrée ; car ils se réjouissaient dans la pensée que les Nazaréens en venant prier au Golgotha auraient l’air d’adorer la fille de Jupiter150. C’est une démonstration frappante de la connaissance entière que l’Église de Jérusalem avait des saints lieux.

Il y a des auteurs qui vont plus loin, et qui prétendent qu’avant la persécution de Dioclétien les chrétiens de la Judée étaient rentrés en possession du Saint-Sépulcre151. Il est certain que saint Cyrille152, en parlant de l’église du Saint-Sépulcre, dit positivement : " Il n’y a pas longtemps que Bethléem était un lieu champêtre, et que la montagne du Calvaire était un jardin dont on voit encore les traces153. " Qu’étaient donc devenus les édifices profanes ? Tout porte à croire que les païens, en trop petit nombre à Jérusalem pour se soutenir contre la foule croissante des fidèles, abandonnèrent peu à peu les temples d’Adrien. Si l’Église, encore persécutée, n’osa relever ses autels au Grand Tombeau, elle eut du moins la consolation de l’adorer sans obstacle et d’y voir tomber en ruine les monuments de l’idolâtrie.

Nous voici parvenus à l’époque où les saints lieux commencent à briller d’un éclat qui ne s’effacera plus. Constantin154, ayant fait monter la religion sur le trône, écrivit à Macaire, évêque de Jérusalem. Il lui ordonna de décorer le tombeau du Sauveur d’une superbe basilique155. Hélène, mère de l’empereur, se transporta en Palestine, et fit elle-même chercher le Saint-Sépulcre. Il avait été caché sous la fondation des édifices d’Adrien. Un Juif, apparemment chrétien, qui, selon Sozomène, avait gardé des Mémoires de ses pères, indiqua la place où devait se trouver le tombeau. Hélène eut la gloire de rendre à la religion le monument